Les deux nouveaux trois étoiles Michelin en France a priori ne se ressemblent pas. La sophistication de l’huile de Menton au citron de Mauro Colagreco et l’amertume de l’endive et de sa racine de Laurent Petit appartiennent à des spectres de saveurs bien distincts. Le chef italien et argentin du Sud ne cesse de grimper dans la liste des 50 Best où il figure désormais à la troisième place, alors qu’à Annecy Laurent Petit radicalise sa cuisine lacustre et végétale sans se trop se soucier du bruit du monde. Mais pourtant on se souvient très bien de notre visite dans les deux établissements, du grand soleil sur la terrasse de Menton des couleurs resplendissantes sur une langoustine croquante. A la pluie battante nous accueillant dans l’univers taupe feutré d’Annecy où nous attendait une écrevisse travaillée jusqu’à son jus de tête.

De la cuisine de Mauro Colagreco au-delà de la grande délicatesse des saveurs nous reste la simplicité de ce beau pain tout chaud tout rond en préambule accompagné d’un poème au levain de Pablo Neruda, puis au final composé de belles cerises dans une coupe, venues de différents arbres. On se souvient aussi de lui quelque moi après à Milan, lors d’un concours de jeunes chefs, il se remémorait l'instant sur sa terrasse, il savait exactement à quel endroit on avait dégusté ses plats. Et quand on lui demande ce qu’il préfère manger: «Les pâtes de ma grand-mère, le goût me revient juste avant d’atterrir à Buenos-Aires.» Chez Laurent Petit les arômes des champignons bruns de la Motte-Servolex cueillis à quatre heures du matin modelés comme un ragoût frappent encore. Puis son côté insatisfait, rageur et tendre: «Ici pas de fausse simplicité!»

Gwendal Poullennec, le nouveau directeur monde des guides rouges a appliqué une politique stricte en matière de trois étoiles Michelin. Trois légendes de la gastronomie française rétrogradent Marc Veyrat à La Maison des Bois une année seulement après l’avoir obtenu; Marc Haeberlin, à l’Auberge de l’Ill triplement étoile depuis 51 ans, un choc pour le chef qui gère aussi les brasseries du Bürgenstock et du Royal Savoy, en Suisse, enfin Pascal Barbot, à l’Astrance perd une troisième étoiles acquise en 2007, à l’Astrance, à Paris avec des menus uniques.

Les nouveaux deux étoiles sont: Hugo Roellinger, Le Coquillage, Bretagne (Cancale); Christophe Hay, La Maison d'à côté, Loir-et-Cher (Montlivault); Stéphanie Le Quellec, La Scène, Hôtel Prince de Galles (Paris) ; David Toutain, restaurant David Toutain (Paris) et Alexandre Mazzia, restaurant AM, Bouches-du-Rhône (Marseille). Ce dernier a aussi reçu le titre de cuisiner GaultMillau de l’année 2019. Sébastien Bras, au restaurant Le Suquet réapparait avec deux étoiles, alors qu’il avait demandé à ne plus figurer dans le guide.

Par ailleurs 68 établissements rentrent avec 1 étoile Michelin. Notamment le Frenchie, à Paris de Gregory Marchand qui signe un menu au Nevaï, à Verbier. Le Neso de Guillaume Sanchez, à Paris. Pilgrim de Terumitsu Saito, à Paris, table plutôt plébiscitée jusqu’ici par Le Fooding, dont Michelin détient 40%. L’Aspérule, à Dijon, du chef Yasunari Okazaki. Racines, à Rennes de Virginie Giboire.

Le Michelin Suisse relèvera tous ses secrets le 5 février au KKL de Lucerne.