Le nom de la famille Bonelli, propriétaire des lieux depuis trois générations, est inscrit en petites lettres dorées sur la porte d'entrée. Ce qui peut apparaître comme un détail raconte déjà un fragment d'histoire, celle de la continuité. Le Grand Chalet fait partie de la poignée d'hôtels à avoir survécu à Leysin. De la quinzaine d'établissements qui existaient encore dans les années 1990, il n'en reste à peine le tiers aujourd'hui.

Sanatorium, pension, hôtel 2 puis 3 étoiles, passant de 15 à 30 chambres. La bâtisse a bravé les époques et su se réinventer. D'un bâtiment carré, construit en 1896 avec les restes du Grand Hôtel, la pension Sylvana s'est muée dans les années 1990 en Grand Chalet lorsqu'on lui rajouta deux ailes et un toit à deux pans.

«Nous avons la chance d'avoir hérité d'un établissement bien entretenu, avec une vue magnifique. Mes beaux-parents ont beaucoup investi», raconte Lysiane Bonelli. Assise sur la terrasse qui surplombe le village avec vue sur les Dents du Midi, le glacier d'Argentière et même le Mont-Blanc, l'hôtelière reconnaît sa chance. Pourtant, cette situation sur les hauts du village n'a pas toujours fait rêver. «Dans les ­années 1970, c'était un endroit éloigné, desservi par une route plus étroite où personne n'aurait imaginé réaliser un hôtel 3 étoiles avec restaurant. Dans ce sens, on peut dire que mes parents Claudine et Livio ont été visionnaires lorsqu'ils ont décidé de transformer la pension Sylvana», explique Jacky Bonelli. Il reprend les rênes de l'établissement familial en 1997. Sa future épouse, alors employée de commerce, le rejoint en 1999 après s'être formée auprès de son beau-frère, lui aussi hôtelier.
 

Un espace bien-être sur la terrasse en passe de s'étoffer
Lysiane et Jacky Bonelli poursuivent la tradition, améliorent l'existant. Ils rajoutent en 2004 un jacuzzi extérieur, aménagent un salon-bar avec cheminée, avant de rénover entièrement l'hôtel entre 2011 et 2014. «C'est par hasard que j'ai découvert l'existence de ce beau mur en pierre, réalisé par mon père. Il l'avait plâtré et peint en vert», relate amusé Jacky Bonelli. Ils privilégient le vieux bois de la région afin de donner un style alpin au­thentique à l'établissement. Depuis juin 2018, ils ont aménagé une salle de massage et proposent des cours de yoga – deux dis­ciplines confiées à des professionnelles. Cet automne, un sauna extérieur viendra compléter leur offre bien-être. «Nous envisageons aussi d'agrandir la terrasse du restaurant ainsi que notre espace jacuzzi», énumère avec entrain Lysiane Bonelli. Le dynamisme et la soif de projets du couple leur réussissent. L'hôtel se porte bien et son chiffre d'affaires est en augmentation depuis cinq ans, grâce notamment à sa présence sur les OTA et le recours à un software de channel manager.
Mais l'optimisme de l'hôtelière se voile un peu lorsqu'elles évoque les exigences croissantes de la clientèle et les nouvelles habitudes: toujours plus de last minute, moins de demi-pension, des séjours plus courts. Une vision à court terme qui complique la gestion du personnel (en l'occur­rence 8,5 personnes). «Recruter reste compliqué et l'obligation d'annoncer les postes vacants aux ORP une catastrophe. En haute saison, nous avons besoin de quelqu'un tout de suite.»

Malgré les difficultés, le couple se dit confiant en l'avenir. Parents de trois enfants, ils espèrent leur transmettre le virus. «Avant aucun d'eux ne s'imaginaient devenir hôtelier. Actuellement tous les trois l'envisagent», sourit Lysiane Bonelli. Et son époux d'ajouter: «Quand ils contemplent la vue, ils se disent aussi que ce serait dommage d'arrêter…»