De nombreux visiteurs chinois arrivent à Zurich ou à Genève. Ces destinations remarquent rapidement les suppressions de vols, bien qu’en ce début de semaine, la situation à Zurich ne semble pas dramatique. «Jusqu’ici, nous n’avons dû faire face qu’à des annulations ponctuelles», affirme Daniel Twerenbold, directeur général de l’hôtel Radisson Blu de l’Aéroport de Zurich et directeur de district pour la Suisse, l'Autriche et l'Italie. Exprimées en chiffres, selon l’hôtelier, début février, les pertes du Radisson Blu Zurich Airport oscillaient entre 10'000 et 20'000 francs. Pour l’ensemble du groupe Radisson, toutes les annulations dues au virus sont gratuites jusqu’à fin février. Selon Daniel Twerenbold, l’absence des clients chinois pèsera bien plus lourd pour les destinations de loisirs comme Lucerne que pour l’hôtel de l’Aéroport de Zurich.

En effet, dans la ville de Suisse centrale, les visiteurs de l’Empire du Milieu représentent avec 9% le deuxième groupe de clients étrangers après les Etats-Unis (18%). Conrad Meier, président de Luzern Hotels et directeur du Grand Hotel Europe, s’inquiète quant à lui de l’interdiction des voyages à forfait et de l’annulation des vols de et vers la Chine: «Depuis cette semaine, nous ressentons les effets de cette interdiction imposée par les autorités chinoises et de la suppression des départs.» Il s’attend ainsi à une forte baisse du nombre de réservations dans son hôtel pour les mois à venir. Markus Conzelmann, General Manager du Radisson Blu Hotel Lucerne, confirme lui aussi que son établissement a déjà enregistré le désistement de deux ou trois groupes. Aucune raison selon lui de céder à la panique. Il pense que la levée des restrictions de voyage en Chine – vraisemblablement entre avril et mai – pourrait même entraîner des saturations, alors chacun voudra partir.

Outre les hôtels, les boutiques spécialisées et les chemins de fer de montagne des régions de Lucerne et d’Interlaken sont aussi directement concernés. Sandrina Estrada-Glaser, des Rigi Bahnen, confirme que les touristes chinois ont essentiellement annulé des réservations à court terme. Pour Peter Reinle, CEO suppléant des Titlis Bergbahnen, la situation n’a encore rien de dramatique: «Les Chinois ne représentent que 5% des touristes en hiver, 12% en été. Nous ne pouvons pas encore chiffrer les pertes, mais elles seront supportables.»

Sur le Pilate, en saison hivernale, environ un tiers des visiteurs – dont la moitié vient de Chine – voyagent en groupe. D’après Tobias Thut, responsable médias de Pilatus Bahnen, l’impact est donc perceptible, mais là aussi, l’été constitue la haute saison touristique chinoise. Comme dans l’Oberland bernois: selon Kathrin Naegeli, le Chemin de fer de la Jungfrau déplore certes quelques annulations de groupes, mais elles sont compensées par de nouvelles réservations pour une période ultérieure de l’année. «Nous avons l’habitude de nous adapter aux subits changements du marché», précise la responsable Communication. Sur le Jungfraujoch, environ 20% des touristes viennent de Chine, dont 40% voyagent individuellement et 60% en groupe. Pour autant que le virus puisse être maîtrisé d’ici mars et que les restrictions de voyage chinoises soient levées, tous estiment que les pertes pour le tourisme suisse devraient être gérables.

Les espoirs sont ainsi tournés vers les mois d’avril, mai et surtout juin, début de la haute saison touristique chinoise en Suisse. Les principaux acteurs de la branche sont unanimes: si le virus était apparu trois mois plus tard, les conséquences auraient très probablement été beaucoup plus graves.

Adaptation et traduction de Régis Gobet


Il pourrait manquer 50 000 nuitées selon les prévisions de Suisse Tourisme

Suisse Tourisme (ST) s’attend toujours à un recul des nuitées pour l'hôtellerie de clients chinois pouvant atteindre 50%. Une estimation qui peut toutefois varier considérablement d’une région à l’autre, tous les prestataires touristiques n’étant pas touchés de la même manière. L’évolution de la situation au-delà du mois de février sera déterminante. La perte sur le chiffre d’affaires n’est, selon ST, que vaguement estimable: du fait des restrictions du trafic aérien jusqu’à la fin du mois, il pourrait manquer en février environ 50'000 nuitées de clients chinois en hôtel (3,15 millions de nuitées au total pour l’ensemble des clients), soit un chiffre d’affaires touristique estimé à 19 millions de francs. Mais il reste possible que certains séjours annulés soient récupérés plus tard dans l’année.   

Lire aussi l'interview de Yong Chen, professeur à l'Ecole hôtelière de Lausanne: «Traiter le virus comme un ennemi», paru le 6 février 2020