La semaine dernière, le Parlement a entériné le contre-projet indirect dans la loi sur les cartels et dans celle sur la concurrence déloyale. La décision des Chambres permet de retirer l’initiative et d’éviter une votation populaire coûteuse pour les parties comme pour le contribuable. Le texte de loi voté ne prévoit pas d’ordonnance de mise en application ; le Conseil fédéral est donc prié de procéder à la mise en vigueur dans les plus brefs délais.

L’initiative déposée en décembre 2017 avec près de 108'000 signatures et le contre-projet du Conseil fédéral modifié par le Parlement donnent des pouvoirs plus étendus à la Commission de la concurrence. Elle a maintenant les moyens de lutter contre les marges excessives imposées par des prestataires en position de force relative vis-à-vis de leur client.

Un architecte me racontait avoir doté un immeuble d’une chaudière à pelets autrichienne achetée à un prix concurrentiel. Lors des travaux de maintenance, le producteur facturait cependant ses prestations et pièces détachées toujours plus cher. Comme l’investissement est de taille, les propriétaires n’avaient pas le choix de changer de producteur et son devenu prisonnier de ce dernier. Dans ce cas-là, la Commission de la concurrence (Comco) aura les moyens d’intervenir. Elle devra « simplement » déterminer si le client est véritablement dépendant de son prestataire. En cas d’abus, celui-ci devra revoir sa pratique. 

Au-delà de ces conditions techniques, l’enjeu porte sur la politique des prix. La Comco ne dira pas quel est le juste prix. Cependant le mécanisme adopté a un effet préventif qui influencera les prix à la baisse. Les prestataires réfléchiront à deux fois avant de fixer leurs marges trop hautes sans raison, et d’éviter le risque de se voir attaquer devant la Comco ou les tribunaux.

En terme d’image, une intervention de la Comco est toujours dévastatrice. Les producteurs étrangers qui profitent du pouvoir d’achat des Suisses pour imposer des prix prohibitifs seront, eux aussi, sur le qui-vive. D’ailleurs, à peine la décision finale connue, les grand bureaux d’avocats-conseils ont envoyés des news alertes à leurs clients étrangers pour les mettre en garde…  

D’autre part, le Parlement a accepté l’interdiction du géoblocage :  Il sera illicite de renvoyer sur un site suisse un internaute qui a choisi un bien sur une page étrangère. Le consommateur suisse bénéficiera de prix plus avantageux et d’une offre de produits plus étendue. 

L’interdiction du géoblocage est une grande percée aussi pour les PME. Comme celles-ci ont besoin irrégulièrement de petites quantités de biens et au contraire des grandes entreprises, elles n’ont pas les ressources pour s’approvisionner directement par d’autres canaux, souvent coûteux et chronophages. La crise du coronavirus a créé un véritable appel d’air en faveur du commerce en ligne. Et le commerce de détail suisse a suivi le mouvement, ce qui va augmenter sa résilience à l’avenir.

Les modifications législatives introduites grâce à l’initiative populaire pour des prix équitables créent des conditions de marché plus justes pour les PME et une plus grande concurrence dans l’approvisionnement de biens à l’heure de la digitalisation.

Pour sa première participation au lancement d’une initiative populaire depuis son introduction en 1893, HotellerieSuisse se réjouit de ce succès sur toute la ligne!