Seul Viognier parmi les finalistes des autres cépages blancs purs du Grand Prix du vin suisse, le millésime 2016 de Yann Comby frappe et séduit par son côté iodé, ces arômes de pêche blanche, de miel, son ampleur florale. «Je recherche une trame un peu acidulée, puis l’amertume, il faut cet équilibre.» Le vigneron de Chamoson qui a repris le domaine familial en 2008, commence sa reconversion bio depuis cette année.

Yann Comby voulait un cépage blanc pour étoffer sa gamme excellence. Il hésite entre le Païen déjà bien présent en Valais, le Chenin qu’il trouve finalement trop vif, pour opter pour le Viognier. Il plante deux clones en 2013 sur une parcelle unique en légère pente de 2600 mètres carrés, pour un rendement de maximum 50 hectolitres à l’hectare, sur une terre calcaire proche de la rivière. Il coupe les raisins en deux, pour obtenir une véraison translucide, limiter le rendement et obtenir plus de concentration. Il ne sonde jamais le vin, il déguste le pépin, la peau.

Ce cépage typique de la vallée du Rhône, dont il apprécie particulièrement «la tension aromatique, malgré le gras», sur la petite et prestigieuse appellation Château Grillet. Pour lui, ce cépage se prête très bien à un travail sans deuxième fermentation. Il loue aussi les tanins, la légère amertume qui permet une macération à froid de 24 heures, un débourbage soft, une fermentation deux tiers en cuve et un tiers en fût neuf. «J’ai horreur du côté fumé, toasté.» Cette année, il a vendangé la parcelle «un poil tard» en quatre jours jusqu’au 25 septembre.

Il veut garder la fraîcheur, le côté très fruité et évoque les vendanges très tôt de la vallée du Rhône, à Condrieu, sur des terres granitiques et la filtration à lie élémentaire. Yann Comby loue la mise en bouteille bourguignonne à même le fût par la chèvre à deux becs de Jean-François Coche Dury «archaïque, pas dans l’air du temps, sans aucune brusquerie». L'orfèvre du Corton-Charlemagne parle de «douceur du transvasement, de goût rustique.» Une autre manière de faire l’éloge de vins pas faciles à appréhender, l’inverse de ceux qui triomphent en concours. Yann Comby regrette qu’on s’éloigne de plus en plus de l’idée de boire du vin en dégustant: «Comme si on se concentrait sur la beauté de l’assiette sans avaler un repas.» Quand il achète du vin, il visite deux vignerons par jour et déguste tous les vins.

A Berne, il présentait le deuxième millésime de Viognier de son histoire, dont on perçoit un potentiel d’ouverture. «Il faut toujours jongler entre une envie de perfection et la commercialisation. Mais en principe, j’élève du vin pour conserver le raisin pas pour qu’il soit prêt quand je veux.» Sur son Viognier 2015, le critique Yves Beck prédisait vingt ans de garde. Yann Comby en sourit.