La transformation vers une industrie climatiquement neutre de l’économie suisse, et du tourisme en particulier, constitue l’une des préoccupations centrales de la Confédération. C’est dans cet esprit que le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) a organisé début juin à Champéry (VS) l’atelier d’étude «Walk the Talk»

Au cours de cette demi-journée d’échanges, entrepreneurs, fondations et institutions ont fait le point sur la durabilité des destinations de montagne suisses, essayant de voir dans quelle mesure les solutions numériques pouvaient soutenir le développement durable dans le tourisme suisse.

Du côté de la demande, les signaux envoyés par le marché sont clairs. Le rapport 2023 sur le tourisme durable de Booking.com, enquête qui analyse les comportements touristiques de 33 000 voyageurs venant de 35 pays, révèle que 76% des personnes interrogées veulent voyager plus durablement au cours des 12 prochains mois. Soit une augmentation de 16% par rapport à 2021 et de 5% par rapport à 2022.

Concilier expérience client et durabilité
Autre indicateur, l’institut de marketing Euromonitor place dans son rapport 2023 la consommation responsable comme l'une des dix premières tendances mondiales de consommation. Et note par ailleurs que les plus de 45 ans ont les mêmes préoccupations que les milléniaux lorsqu’il s’agit de voyager de façon responsable.

Notre idée: faire comprendre que voyager durable, c'est mieux.
Morgane Pfefferlé, Cofondatrice de l'agence Travelise

Comment mettre au point des produits permettant des expériences clients originales, tout en répondant aux attentes de durabilité? Pour illustrer cette question, le Seco avait invité Morgane Pfefferlé, cofondatrice en 2016 avec Alain Quartenoud de l’entreprise valaisanne Travelise. Il s’agit de proposer des voyages-surprises pour individuels et entreprises en Suisse et en Europe. Le principe: le client découvre au dernier moment la destination, les endroits à visiter et son hébergement. Toutes les informations nécessaires sont communiquées grâce à une app à télécharger.

«Notre idée est de faire comprendre aux clients qu’un voyage durable, c’est encore mieux. On inclut à chaque fois dans nos offres des activités avec des prestataires locaux, des rencontres avec des artisans, etc.» Le Covid a clairement marqué une rupture pour l’entreprise, qui, depuis, ne propose plus aucun trajet avec l’avion mais seulement avec le train. «Nous sommes persuadés que le train peut devenir le moyen de transport de prédilection en Europe dans les années à venir», ajoute la jeune entrepreneuse.

Avec le soutien financier d’Innotour, Travelise a lancé en 2021 le produit «Swiss Tour Surprises». Une déclinaison de la formule précédente, où il s’agit cette fois-ci de découvrir au cours d’une journée et en quelques étapes les secrets culinaires et culturels d’un canton. Pour l’heure, sept régions touristiques sont répertoriées (Genève, Vaud, Valais, Fribourg, Berne, Tessin, Jura & Trois-Lacs), mais la liste s’allongera dans les mois et années à venir. «La construction de voyages individuels et pour les groupes serait, pour nous, impossible sans la digitalisation, qui est l’une des clefs du tourisme durable», souligne Morgane Pfefferlé.

Outils numériques pour optimiser les économies
La Summit Foundation accompagne les destinations dans leur démarche vers la neutralité carbone, en leur proposant des solutions concrètes sur mesure. «Tout le monde a conscience qu’il faut agir, mais la mise en place d’initiatives durables est souvent perçue par les responsables comme chronophage, compliquée et illusoire», explique Laure Desmaris, ingénieure gestion de projets à Summit Foundation.

Tout le monde a conscience qu’il faut agir, mais la mise en place d’initiatives durables est perçue comme chronophage, compliquée etparfois illusoire.
Laure Desmaris, Ingénieure gestion de projets à Summit Foundation

Forte d’une expérience de 20 ans dans ce domaine, cette organisation suisse soutenue par Innotour a développé des programmes dans lesquels la numérisation joue également un grand rôle, comme l’optimisation de la consommation d’électricité des remontées mécaniques au travers d’une convention d’objectifs signée avec l’Office fédéral de l’environnement ou encore l’optimisation des plans de damage permettant des économies de carburant et de production de neige.

De son côté, la fondation myclimate a élaboré le projet de recherche «ClimDest» en collaboration avec la haute école spécialisée des Grisons et les destinations touristiques de Davos, d’Arosa et de Val Poschiavo. Toutes trois poursuivent l'objectif zéro carbone net d’ici à 2030. Outre la réalisation d'un bilan CO₂ complet de la destination, le programme «ClimDest» met en œuvre des mesures visant à réduire les émissions sur place, tout en opérant un travail de sensibilisation de la population et des hôtes pour les associer au maximum à cet objectif.


Innotour

Aides financières jusqu’à 70% du montant du projet

Innotour est le programme encourageant l'innovation lancé par le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) pour le tourisme. Il s’adresse aux acteurs privés et publics du tourisme suisse et soutient en premier lieu des projets à vocation nationale ainsi que des projets locaux et régionaux, dans la mesure où ceux-ci ont un caractère de modèles. Innotour se concentre sur les innovations, la coopération ainsi que le développement et la diffusion du savoir.

Lors de la session de printemps, le Parlement a suivi la proposition du Conseil fédéral et a adopté une modification de la loi, selon laquelle la part de la Confédération dans les projets Innotour pour la période 2023-2026 passe de maximum 50% actuellement à un maximum de 70%. Les demandes peuvent être déposées au Seco depuis la fin mars 2023.

«Cette aide financière supplémentaire s’inscrit dans un programme de relance adopté par le Conseil fédéral, qui a pour objectif de promouvoir la reprise du secteur après la pandémie de Covid. Le Conseil fédéral souhaite promouvoir davantage les projets de numérisation, de développement durable et ceux liés au tourisme urbain et d’affaires dans le tourisme suisse», explique Mireille Corger-Lattion, cheffe suppléante de programme pour la politique du tourisme au Seco.

La nouvelle stratégie touristique de la Confédération, adoptée fin 2021, vise à rendre le secteur touristique performant et compétitif au niveau international et faire de la Suisse une destination touristique incontournable. Pour obtenir une contribution Innotour, le requérant doit notamment montrer comment son projet contribue à améliorer l’attrait de l’offre, renforcer la présence d’opérateurs suisses sur le marché, promouvoir l’entrepreneuriat, contribuer au développement durable et exploiter les opportunités du numérique. Les aides financières Innotour sont à fonds perdus.

«Il est important de noter que, pour obtenir une aide financière au titre d’Innotour, le financement résiduel du projet doit être assuré», souligne Mireille Corger-Lattion. «En clair, Innotour intervient à titre subsidiaire. Le porteur de projet doit fournir la preuve du financement résiduel à l’aide d’attestations de financement.»