Chez nous, les générations cohabitent comme dans un écosystème. Un peu comme dans la nature: il faut du temps pour que l’équilibre s’installe, mais une fois trouvé, chacun trouve sa place et l’ensemble devient plus fort. Cette culture, mon père l’a façonnée au fil des ans. Avec une conviction simple: peu importe l’âge, si la personne est motivée et engagée, elle a sa place. Aujourd’hui encore, cette philosophie irrigue notre quotidien.
Cette cohabitation est une réalité pour nous. Le plus jeune de l’équipe a 17 ans. Il découvre le monde du travail avec ses règles, ses codes, ses attentes. Il est curieux, rapide, mais cherche encore sa place. Le plus âgé a 79 ans. Il vient quelques heures par semaine, à son rythme. Il continue à travailler avec plaisir, pour transmettre et, surtout, pour se sentir utile. Et il n’est pas moins connecté: il guette les likes sur ses publications Facebook, curieux de savoir combien de vues son dernier post a fait. Tous deux, à leur manière, cherchent à exister aux yeux des autres. Cette quête commune les rapproche et fait germer un intérêt sincère l’un pour l’autre.
Ce mélange d’âges crée un tissu vivant. Le lien entre générations se tisse autant dans les échanges informels que dans le quotidien professionnel. On ne l’organise pas dans les moindres détails, mais on le rend possible: un apprenti gère une réservation, une autre cuisine, un jeune sert un repas, un collègue expérimenté prend ensuite le relais pour guider une visite. Chacun agit à sa manière, et cela fonctionne. Ce n’est jamais figé: les rôles se croisent, les profils se complètent. Ce n’est pas un alignement parfait, c’est un ballet parfois improvisé, mais toujours humain.
Ce n'est jamais figé: les rôles se croisent, les profils se complètent. Ce n'est pas un alignement parfait, c'est un ballet parfois improvisé mais toujours humain
Notre équipe, c’est aussi une mémoire vivante: certains collègues sont là depuis 35 ans, en moyenne depuis plus de 10 ans. Des enfants d’hier deviennent les collègues d’aujourd’hui. Alors oui, il faut parfois expliquer, réexpliquer. Un mot mal compris, un geste mal interprété. Mais ce ne sont pas les différences de générations qui posent problème, mais nos façons de communiquer. Et c’est là qu’intervient un ingrédient essentiel: la confiance. Chez nous, certains jeunes arrivent méfiants, sur la défensive, voyant d’abord toute remarque comme une critique. Mais avec le temps, les échanges, les exemples, ils comprennent qu’ici, on parle. On ose dire les choses, même celles qu’on n’a pas envie d’entendre. Ce n’est pas pour juger, mais pour avancer ensemble. Car on se fait confiance. Qu’importe notre âge, nous devons accepter les remarques: c’est notre devise!
Et maintenant? La génération Z est bien là. L’Alpha est sur le pas de la porte. Plus de soixante ans d’écart, parfois. Et pourtant, une vraie complémentarité. Les uns apportent leur maîtrise des outils numériques, les autres leur capacité à relativiser, à s’adapter, à accompagner les changements, l’un après l’autre. Ensemble, ils font vivre notre vision de l’hospitalité, entre tradition et innovation.
C’est cette diversité-là, faite d’expériences croisées, de rythmes différents et de regards mêlés, qui rend notre métier si vivant. Et profondément humain. Notre vision de l’hospitalité, entre tradition et innovation.
Passionnée de durabilité, Laure von Wyss s’engage au quotidien pour le tourisme au Val-de-Travers. Directrice de l’Hôtel de l’Aigle à Couvet et de l’organisation touristique Goût et Région depuis six ans, elle préside la section Neuchâtel-Jura d’HotellerieSuisse et siège au conseil d’administration de la Société suisse de crédit hôtelier.
