Quelques minutes après le sacre du Eleven Madison Park, de l’Argovien Daniel Humm comme numéro un du classement 50 Best de San Pellegrino, nous avons cherché à joindre le grand chef romand Gérard Rabaey. Il fut son formateur, il y a quatorze ans, au Pont de Brent (à l’époque trois étoiles Michelin). On lui apprend la nouvelle.
Comment réagissez-vous: Daniel Humm au sommet de la liste San Pellegrino 50 Best?
Je suis content. Fier de ce que je lui ai transmis. J’ai des contacts réguliers avec lui, quand quelqu’un en Suisse cherche à réserver une table dans son restaurant, il passe par moi. Car Daniel est devenu un peu inaccessible, mais pour moi jamais. J’ai mangé deux fois au Eleven Madison Park, en 2013 et en 2014, après avoir couru le marathon de New York. Le soir même. Vous savez, il est parti aux Etats-Unis avec 100 dollars en poche…
Quel souvenir gardez-vous de lui?
Il se démarquait des autres, il était très assidu. J’avais la réputation de tenir une discipline très militaire en cuisine, lui il notait toujours tout, cela créait un peu de jalousie. Peut-être qu’on pouvait déceler en lui une ambition secrète… Il avait beaucoup de plaisir en pâtisserie. J’aimais son honnêteté au travail, son humilité bien de chez nous, comme celle d’un autre de mes cuisiniers Didier de Courten. Il dit qu’il pense tous les jours à moi.
Comment qualifieriez-vous sa cuisine?
Il n’a jamais refoulé ses bases classiques. Il cuisine des produits de l’état de New York, à partir de ses bases avec un sacré sens de la mise en scène. Je n’ai jamais pu payer un repas dans son restaurant. Alors je l’ai invité, il y a deux ans, à dîner chez Benoît Violier, cela a donné une très belle rencontre.
Vous souvenez-vous d’un goût en particulier dégusté au Eleven Madison Park?
Son tartare de carotte, très suisse, râpé devant nous à la machine. On pouvait l’assaisonner avec onze condiments. J’ai mis toutes les épices, ma femme n’a pas osé. C’était fabuleux. J’ai été marqué aussi par son canard américain, car ici on travaille surtout le canard nantais. On a parlé de son producteur de sel qui produit entre 50 et 100 kilos par année.