Imaginez-vous dans un cours qui n'est plus enseigné par un professeur, mais par les étudiants eux-mêmes. Une utopie? Non, c'est devenu la réalité dans ma partie du module digitalisation du tourisme à la Haute école de gestion à Sierre. La stratégie d'enseignement s'appelle eduScrum, et l'objectif principal est de rendre les étudiants responsables de leur apprentissage – et de celui de leurs collègues. L'hypothèse sous-jacente, qui me fascine tout autant que la démarche agile, est que les étudiants pourraient apprendre encore mieux lorsque les contenus sont préparés et dispensés par leurs pairs. Les premiers résultats sont très prometteurs. Néanmoins, pour éviter que la pédagogie agile culmine dans une liberté totale, il faut quelques règles. 

EduScrum est une méthode d'apprentissage agile qui s'inspire du développement itératif de logiciels. C'est une forme d'enseignement extrême qui se passe d'une grande part de la préparation et du rythme d'un cours classique. Dans un cours eduScrum, les contenus d'apprentissage ne sont pas élaborés et enseignés par des enseignants, mais par les étudiants. La personne responsable du cours divise la matière en thèmes et les distribue à des équipes d'étudiants, qui élaborent les bases d'apprentissage de manière autonome. Les questions en suspens sont clarifiées lors de réunions hebdomadaires, et le progrès vers les objectifs d'apprentissage est systématiquement contrôlé. Le responsable du cours prend tour à tour le rôle de propriétaire du cours, d'expert, de coach et d'examinateur. 
A Sierre, dix équipes d'étudiants viennent ainsi de travailler sur la matière du cours pendant cinq semaines et de produire des micro-unités d'apprentissage, appelés flashlearns. Ces derniers, d'une durée d'environ 30 minutes, sont mis à la disposition de toute la classe et du grand public. Les étudiants qui suivent le cours ont eu par la suite la mission de suivre les 10 flashlearns du cours. Chaque flashlearn est structuré de la même façon. Une brève vidéo introductive présente le sujet et les objectifs d'apprentissage. La thématique est ensuite structurée en quatre sous-thèmes, chacun introduit par les étudiants avec une présentation sonorisée, une vidéo d'animation, une vidéo explicative et un quizz. L'objectif est que les étudiants se transmettent la matière de façon ludique et attractive. 
Dans un cours eduScrum, l'enseignement frontal cède sa place à la découverte, aux échanges et aux discussions. Pour que la stratégie puisse pleinement se déployer, les objectifs d'apprentissage doivent au préalable être minutieusement définis et communiqués. Tout le monde doit connaître les critères de succès, les celebration criteria, comme on les appelle dans eduScrum. Le travail préparatoire pour un tel cours n'est pas moindre, mais sa nature change radicalement et il se fait intégralement avant la première rencontre de cours.  

Une large majorité des étudiants questionnés après les cours (80%) apprécie eduScrum. Ils qualifient la stratégie d'apprentissage d'avant-gardiste, peu habituelle, mais somme toute intéressante et efficace. Parmi les éléments-clés de succès d'eduScrum, les étudiants mentionnent la définition précise des objectifs de formation, l'encadrement personnalisé de semaine en semaine ainsi que l'accompagnement par des spécialistes technico-pédagogiques durant la production des contenus d'apprentissage. Les flashlearns font aujourd'hui partie de l'offre numérique de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale. Et j'appliquerai avec encore plus d'enthousiasme la stratégie eduScrum dans mes prochains cours!

La méthode eduScrum 
eduscrum.org
Les flashlearns produits par les étudiants pour les étudiants 
numerique.hes-so.ch


Expert en tourisme, Thomas Steiner est membre du jury du Milestone et du comité de Suisse Tourisme. Il est professeur à la HES-SO Valais et CEO de Immotour Sàrl.