La plupart des personnes à qui je pose cette question répondent spontanément que non. Les notions de confiance et de durabilité sont toujours bien ancrées dans l’esprit des décideurs informatiques. Or, l’information, aussi l’information touristique, prend différentes formes. Toutes ne sont pas confidentielles ou vitales au point qu’on doive exclusivement les traiter avec des logiciels déployés sur des plateformes connues depuis plusieurs décennies.

Thomas Steiner
Expert en tourisme, Thomas Steiner est membre du jury du Milestone et du comité de Suisse Tourisme. Il est CEO d'Immotour Sàrl.

Nous assistons depuis quelques années à une véritable explosion des applications et plateformes, et ce dans tous les domaines. L’observateur technologique chiefmartec.com, par exemple, fait état de 150 applications spécifiques au marketing en 2011. Ce chiffre a augmenté à 3500 en 2016 pour atteindre 8000 solutions en 2020. Et cela ne représente que la pointe de l’iceberg, puisque selon d’autres sources, plus d’un demi-milliard d’applications et services verront le jour dans le cloud d’ici à 2023. Comment expliquer une telle croissance?

Depuis les années 1990, l’expertise requise pour réaliser des logiciels a continuellement baissé. Au point qu’aujourd’hui, certains utilisateurs réalisent eux-mêmes directement les solutions dont ils ont besoin. Selon les experts encore, cette évolution se renforcera davantage avec l’arrivée récente des outils «no-code» qui permettent de réaliser des solutions complètes sans écrire une seule ligne de code. De nombreuses plateformes dans le cloud contribuent déjà à cette démocratisation du génie logiciel.

J’ai eu récemment l’occasion d’accompagner des collaborateurs à la réception et au back office dans la réalisation de telles applications que je qualifierais d’éphémères. Éphémères, puisque ces solutions naissent et disparaissent avec les personnes qui les conçoivent. Nous avons choisi Ninox.com parmi plusieurs centaines de plateformes no-code disponibles. Il est évident qu’aucune donnée vitale d’une entreprise ne sera durablement gérée avec de telles applications éphémères. Il n’empêche que ces solutions, réalisées directement par les utilisateurs, peuvent contribuer à un gain de temps considérable. Elles facilitent le traitement des tâches courantes et garantissent une certaine rigueur dans les processus.

Les applications éphémères sont aujourd’hui à la portée de tous les acteurs touristiques. L’exemple de la réception peut être généralisé à l’hôtellerie, à la restauration ou à l’événementiel: le réseau regorge d’exemples, de meilleures pratiques et de vidéos expliquant comment gérer les relations clients, les stocks, les inventaires, organiser des événements, planifier le personnel, gérer des réservations ou maîtriser la facturation – pour n'en citer que quelques-unes.

Un avertissement doit néanmoins être lancé à quiconque voulant réaliser soi-même ses applications: la protection des données doit être garantie. La plateforme choisie doit respecter les normes, notamment le règlement général sur la protection des données (RGPD) et les standards de l’entreprise. En outre, puisque de nombreuses plateformes no-code apparaissent et disparaissent, la persistance des données est un défi majeur. Les backups ainsi que l’extraction et la sauvegarde des données temporaires du cloud deviennent primordiaux. Puisque ces outils peuvent finalement disparaître comme ils arrivent, des solutions alternatives doivent continuellement être évaluées.

Est-ce que je confierais mes données pour 100 dollars par année au cloud d'une entreprise dont je n’ai jamais entendu parler? Clairement oui en ce qui concerne les données éphémères et pour être plus agile. La réception que j’ai mentionnée plus haut travaille aujourd’hui avec une solution réalisée en quelques minutes et instantanément accessible sur les téléphones portables. Le traitement des demandes et des quittances, ainsi que leur suivi, sont clairement plus efficaces. Ce gain de temps et cette réactivité peuvent conférer à l’entreprise un avantage compétitif sur d’autres, qui attendent encore le prochain passage de leur développeur de logiciels.

La chronique Tourisme du cahier français cède la plume à Jean Pierre Pastori, Marie-Françoise Perruchoud-Massy, Pierre Starobinski et Thomas Steiner.