Quel est l'état réel de l'adoption de l'IA dans l'hôtellerie et quels sont les principaux obstacles qui entravent sa progression? Pour le savoir, la HES-SO Valais a interrogé plus de 1500 hôtels dans six pays européens entre janvier et avril 2025. Ce sondage a été réalisé avec l’aide des associations hôtelières d'Autriche, de France, d'Allemagne, de Grèce, d'Italie et de Suisse. Les résultats sont clairs: l'adoption de l'IA progresse, mais des écarts subsistent entre les intentions et l'exécution.

ChatGPT et Gemini ont la cote 
Première conclusion de l'étude: les hôteliers s'intéressent à l'IA. Quant à savoir où l'IA pourrait être la plus utile, 68 % des répondants ont cité les réservations, suivies du marketing (62 %), de la gestion de la relation client (51 %) et de l'analyse des données (49 %). 

Cependant, l'utilisation réelle est à la traîne, révèle l'étude. Les niveaux d'adoption restent modestes mais augmentent: ainsi, 41 % des hôtels interrogés utilisent l'IA. Alors que 43 % des hôtels déclarent ne pas utiliser du tout l'IA, 16 % prévoient de l'adopter dans un avenir proche. 

Les seules applications vraiment courantes parmi ls hôtels ayant adopté l'IA sont les outils de génération de contenu comme ChatGPT ou Gemini, utilisés par 74% des hôtels, et l'analyse des commentaires en ligne (44%). 

Au-delà, l'adoption chute rapidement: la gestion des revenus en temps réel est à 42%, les services de personnalisation des clients à 38% et l'analyse prédictive à 37%. Les technologies plus avancées ou nécessitant une infrastructure plus lourde comme les chatbots (31%), la reconnaissance faciale (2%), la robotique (3%) et l'analyse des déchets (8%) restent marginales.

La méconnaissance comme frein principal
«L'IA n'est pas freinée par un manque d'enthousiasme, mais par des connaissances et des capacités limitées», estime Roland Schegg, professeur à l’Institut de tourisme de la HES-SO Valais, en charge de la coordination de l'étude. L'obstacle le plus souvent cité dans l'étude est la «méconnaissance des solutions d'IA disponibles» (39 %), suivie des coûts d'installation élevés (35 %), de la complexité technique (34 %) et du manque de compétences techniques (32 %).

Ces défis sont particulièrement aigus pour les hôtels de petite et moyenne taille, qui manquent souvent de ressources internes pour gérer les mises à jour techniques.

Les préoccupations concernant la confidentialité des données et les obstacles à l'intégration sont également très présentes. Le retour sur investissement fait également l’objet d’incertitude. 

Des attentes élevées, des résultats mesurés
Parmi ceux qui utilisent déjà l'IA, les perceptions sont plus optimistes. Sur une échelle de 1 à 10, les hôtels ont évalué les avantages globaux de l'IA à 6,6, avec une note médiane de 7,0. 

Les avantages les plus fréquemment mentionnés sont le gain de temps (76 %), l'amélioration de la communication (54 %) et l'amélioration de l'efficacité opérationnelle (51 %). 

Un facilitateur plutôt qu’une menace
Roland Schegg y voit une transition entre la «phase de curiosité» et la «phase d'ancrage opérationnel» de l'IA dans l'hôtellerie. Les hôtels expérimentent, mais ne passent pas encore à l'échelle supérieure. 

Pour le professeur, l’IA n'est plus une promesse lointaine pour le secteur de l'hôtellerie: elle devient un élément central de la transformation stratégique. L’IA doit être intégrée dans une stratégie numérique plus large, exigeant de l’implication du personnel et un changement d’état d’esprit.  

«L'IA ne doit pas être considérée comme une menace pour l'hôtellerie traditionnelle, mais comme un facilitateur, estime encore Roland Schegg. Lorsqu'elle est déployée de manière réfléchie, l'IA permet aux équipes de se concentrer sur ce qu'elles font le mieux: offrir des expériences personnalisées et de grande qualité. L'avenir appartiendra à ceux qui sauront allier la chaleur humaine à des systèmes intelligents et mener leur organisation à travers la prochaine vague de transformation numérique.» (cp) 

A propos de l'étude
Cette publication fait partie du projet flagship «Resilient Tourism», financée par Innosuisse et menée par la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Valais (HES-SO Valais) en collaboration avec la Hospitality Business School de l'EHL et plusieurs associations hôtelières nationales. L'objectif du projet est de soutenir le secteur suisse du tourisme et des voyages dans sa transition vers des modèles commerciaux plus axés sur les données, plus numériques et plus résilients.

Le rapport présente les résultats d'une enquête menée entre janvier et avril 2025 auprès de plus de 1'500 hôtels en Autriche, en France, en Allemagne, en Grèce, en Italie et en Suisse. Un accent particulier a été mis sur les technologies d'intelligence artificielle (IA), en explorant les perceptions de l'impact, les niveaux d'adoption, les domaines d'application, les avantages et les obstacles. Cette étude s'appuie sur une première édition réalisée en 2023, permettant une perspective comparative sur l'évolution de l'utilisation de l'IA dans l'hôtellerie européenne.

Un deuxième rapport porte sur l'adoption de l'IA dans les stratégies de gestion des revenus et de distribution hôtelière. 

En savoir plus sur l'étude: 

Artificial Intelligence in European Hotels